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Libéralisation de la vente des pièces détachées : L'Arlésienne made in France

article La Feda déterre la hache de guerre

Les promesses n'engagent que ceux qui les croient ? La libéralisation des pièces détachées automobiles est un vieux serpent de mer qui agite les réparateurs, les constructeurs, l'État et pour finir les consommateurs. Pourquoi en reparler aujourd'hui ? Tout simplement parce que la Fédération de la distribution automobile, Feda, a lancé une campagne dans les médias pour rappeler au gouvernement Macron les promesses de l'ancien Premier Ministre, Édouard Philippe. Cette campagne sera visible dès aujourd'hui dans les grands médias nationaux. D'un point de vue extérieur, on pourrait penser que c'est une lutte intestine, mais c'est un combat entre lobby, politique, idéologie avec le consommateur comme témoin. On fait le point sur les arguments des uns et des autres...

Les enjeux de la libéralisation ?

D'un côté, nous avons la promesse de la Feda et d'autres associations que la baisse des prix des pièces détachées sera drastique, ce qui devrait entraîner une baisse significative des assurances auto. Nous garderons la réserve nécessaire sur ce dernier point puisque nous savons que tout ce qui monte finit par descendre ; une loi immuable sur terre  qui ne semble pas concerner les prix de nos amis assureurs. Pour les constructeurs, c'est une perte d'argent substantielle et une concurrence qui va fondre sur eux. Pour les hommes politiques, c'est du pouvoir d'achat pour les Français, mais c'est aussi une question idéologique.

Les arguments des pro-libéralisation de la Feda

Pour un grand nombre, c'est un anachronisme français puisque beaucoup de pays ont cassé le monopole des constructeurs. C'est toujours un argument douteux comme si le marché automobile, la culture et la structure de la distribution étaient identiques partout en Europe. Il faut bien comprendre que ce monopole sur le marché français concerne tous les constructeurs quelle que soit sa nationalité, ce qui le rend légal aux yeux de l'UE. L'argument qui a du poids, c'est bien entendu celui du prix et il peut donner le vertige. En 3 ans, les pièces détachées ont augmenté de 11 points (6 % en 2019, 2,4 % en 2018 et 2,3 % en 2017) dans l'hexagone. Pendant ce temps, les prix des pièces détachées auraient baissé en Europe...

La FEda attaque le bgouvernement sur sa promesse non-tenue de libéraliser le marché des pieces déctachées

Deux enquêtes qui font mal

Une enquête de Mediapart en 2018 a attisé les braises de la discorde. Le média d'Edwy Plenel a mené une longue investigation qui démontrerait que PSA et Renault se seraient entendus pour surfacturer les pièces détachées pour un profit de 1,5 milliard sur 10 ans. On est évidemment dans le monde du conditionnel, mais les journalistes du média en ligne, dont on connaît le sérieux, ont même établi que 34 constructeurs auraient utilisé un logiciel pour s'accorder discrètement sur les prix. Ces logiciels sont dans le collimateur des autorités de régulation européenne, mais aucune suite judiciaire n'a été donnée. PSA a répondu "La stratégie d'après-vente du groupe consiste à offrir des gammes de pièces de rechange répondant aux besoins de tous les consommateurs, quel que soit leur budget, avec le plus haut niveau de fiabilité et de sécurité".
Le sujet est complexe, mais il y a clairement des choses étranges qui ne semblent pas à l'avantage des consommateurs. La Feda estime qu'une libération entraînerait une baisse de 17 % des prix des pièces détachées. D'un autre côté, si on sort la tête du porte-monnaie, on peut aussi se demander comment ces  économies seront faites ? Sur la production, sur la qualité, sur l'environnement, sur les salariés ? Le monde change et on sait, aujourd'hui, que le prix des choses peut avoir un coût humain et environnemental. Alors pourquoi ne pas profiter du recyclage des pièces détachées et de l'économie circulaire ? C'est pourtant une façon simple, disponible, créatrice d'emploi et bonne pour l'environnement, non ?

Les pieces issus du recyclage et de l'economie circulaire

On pourrait penser que le lobby des constructeurs est le grand méchant et qu’heureusement la Feda est là pour protéger les consommateurs ! Trop simple, non ?
Et bien, une autre enquête de 60 millions de consommateurs vient mettre les réparateurs sur le banc des accusés. En effet, l’enquête démontre que les réparateurs conseillent à plus de 70% des pièces neuves en ignorant totalement les pièces recyclées. Rappelons que depuis le 1er janvier 2017, les réparateurs sont obligés de proposer des pièces issues du recyclages. Pour le consommateur, l'économie peut aller jusqu'à 50 % du prix pour une pièce testée, contrôlée et authentifiée. D'un côté, la Feda dénonce l’augmentation du prix des pièces, et cela à juste titre, mais en même temps, les réparateurs ne jouent pas le jeu des pièces recyclées. Dès lors, s'indigner de l'augmentation du coût moyen des réparations semble quelque peu paradoxal !

Ce que dit la Loi

La loi d’orientation des mobilités, adoptée fin novembre 2019, devait libérer le marché, mais le conseil constitutionnel l'a invalidé. Depuis, le gouvernement a retenté sa chance pour un résultat identique. La Feda y voit de la mauvaise volonté du gouvernement, tandis que les constructeurs concluent qu'ils sont dans leur bon droit... Le coup de com' de la Feda ne devrait pas changer grand chose puisque la volonté du gouvernement est de protéger les constructeurs français alors que la crise fait rage.  On ne fera pas un concours Facebook pour savoir si cette loi va passer avant 2022, mais on mettrait bien une pièce pour miser sur un report  aux calendes grecques. En attendant, si vous voulez faire des économies, vous avez le droit d'exiger de vos réparateurs qu'ils vous proposent des pièces détachées issus du recyclage.

 

 

 

 

 

 

Publié le 17 Avril 2021