Lancia est un constructeur mythique d'une Italie dont le secteur automobile était le fleuron de la nation. Le temps est passé et l'industrie automobile européenne et italienne a décliné, gardant principalement Fiat et quelques constructeurs de rêves comme Ferrari et son frère ennemi Lamborgini. Lancia fait partie de ce panthéon, mais des années difficiles ont plongé le constructeur dans un anonymat surprenant au vu de son histoire. Il se pourrait que Lancia sorte de sa torpeur en revenant sur le devant de la scène avec une gamme à la hauteur de son histoire. Avant de vous parler de son passage au Salon de l’Automobile de Lyon 2025, nous vous contons l'histoire de la marque italienne, celle que les Italiens surnomment tendrement La bella addormentata, « la belle endormie » ! Pour ses tifosis, Lancia sera toujours la regina dei rally : la reine des Rallyes.
Lancia, une histoire épique
Né en 1906 de la main d'un pilote automobile, Vincenzo Lancia, la marque va se distinguer par des choix innovants. Comme souvent, à cette époque, le fondateur se révèle également ingénieur et touche-à-tout. Pour Vincenzo, l'innovation est le maître-mot et le nerf de la guerre. La Lancia Alfa,1908, premier modèle du constructeur, tournait sur un innovant moteur à soupapes en tête. Le Tipo 51, 1919, utilise la première suspension indépendante à quatre roues de l'histoire. L'innovation à cette époque dorée se testait en course ; Lancia se fit un nom sur l'asphalte avec des victoires prestigieuses lors des courses d'endurance et de tourisme. On peut dire que le constructeur italien est parti de tout en bas, souffrant de ses capacités financières limitées qui lui interdirent de participer au Championnat du monde de monoplace. Lambda, Artena, Astura et Aprilia ; ce sont autant de modèles qui ont démontré la créativité de Lancia : la suspension indépendante à double triangulation, le premier châssis monocoque pour une berline ou la direction assistée, etc.
Il faut attendre les années 50 pour retrouver Lancia se distinguer avec l'Aurélia (1950). La voiture intègre une suspension à quatre roues indépendantes, une boîte de vitesses différentielle à l'arrière et le premier moteur V6 de série, conçu par Francesco De Virgilio. La version course de la Lancia D50 (1954) peut être considérée comme championne du monde de Formule 1, mais parfois l'histoire est cruelle. Peut-être que vous avez tiqué en lisant cette hérésie. Tout le monde sait qu'en en 1956, c'est Fangio qui gagne le titre avec Ferrari D50... En réalité, cette Ferrari D50, c'est la D50 Lancia. Elle est légèrement modifiée au niveau du châssis et des réservoirs latéraux qui seront supprimés. D'ailleurs pour l'anecdote, on voit le logo Lancia sur certaines D50 Ferrari. En 1969, drame pour les tifosis de Lancia, Fiat rachète la marque. Si le mariage a été imposé par les finances en berne du constructeur, on peut quand même dire qu'il a eu des jours heureux. Fiat a réduit les coûts, mais laisse à Lancia ses appétences originelles : le sport et l'élégance.
Lancia : la légende du Rallye
Finalement, c'est sur la route, la terre, le sable et la neige que Lancia va écrire sa légende. La Lancia Stratos va s'imposer dans le championnat du monde des Rallyes avec trois titres consécutifs (1974-1975-1976) et pour le clin d’œil avec le V6 Ferrari Dino. Lancia renaît de ses cendres dans l'une des plus grandes compétitions automobiles du monde. En 1983, le constructeur italien cherche à retrouver son titre, mais Audi domine la course avec la légendaire Quattro et ses quatre roues motrices. C'est sans doute le pari le plus audacieux de l'histoire de la course automobile que Lancia va faire : construire une voiture qui va privilégier la simplicité et la légèreté pour aller chercher l'Audi sur l’asphalte tout en lui abandonnant les autres surfaces et tout cela en deux roues motrices. La Rally 037 était, en caricaturant volontiers, l’antithèse de la star de l'époque et figurait le choc entre David et Goliath. Lancia remporta plus qu'un titre WRC, mais elle gagna une histoire à raconter, de celles qui deviennent légende : pour les passionnés et les cinéphiles le film Race to glory, 2024, du réalisateur Stefano Mordini raconte cette histoire.
Et puis quelques années après, c'est l'histoire de la Lancia Delta qui mériterait une chronique à elle seule : Six titres de WRC, voiture la plus vendue de la marque, la Lancia Delta est un véritable mythe qui aurait dû maintenir Lancia au firmament. Tout commence en 1979 : sous la plume du designer Giorgetto Giugiaro, le constructeur italien présente la première Delta qui obtient en 1980, le prix de la voiture européenne de l’année 1980. Vous connaissez l'acronyme HF ? Chez Lancia, c'est l'empreinte de la sportivité et de la fiabilité, HF pour High Fidelity. La Delta HF Turbo sort en 1983 avec un moteur de Moteur 1.6 turbo, environ 130 ch. Ce ne sera pas le succès escompté parce que Lancia, décidément pas toujours à la pointe niveau commercial, va la cannibaliser en sortant la Delta HF Integrale, la regina dei rally :
- Six titres constructeurs consécutifs en WRC (1987–1992)
- quatre titres pilotes (Juha Kankkunen et Miki Biasion).
- 46 victoires en rallye mondial.
Lancia détient la plus longue série de titres constructeurs, juste devant Citroën avec cinq titres consécutifs. Comment la Reine des Rallye est devenue la Belle endormie ?
Lancia : De l'endormissement à un nouveau réveil ?
On pourrait dire que cela arrive plus souvent qu'on le croit. On peut penser à Bugatti, et même Lamborghini qui ont connu de longues décennies en végétation. Aujourd'hui, Chrysler, Jaguar ou Maserati ont glissé ou semble glisser loin des projecteurs. Lancia va s'éteindre parce que Fiat va totalement se tromper sur le destin de la marque : Lancia quitte le WRC en 1993. Peu à peu, la marque se retrouve écrasée par Alfa Roméo et la Fiat. L'image de Lancia se brouille avec des gammes comme la Prisma, la Thema ou la Dedra utilisant de technologies du groupe. Le design insipide, des gros problèmes de fiabilité, une baisse de la qualité des finitions... Bref, Lancia s'est perdu dans un groupe qui a renoncé à la singularité de Lancia. Depuis la création du groupe Stellantis, Lancia semble être redevenue une préoccupation et un nouvel élan lui a été donné avec la nouvelle Ypsilon, disponible en deux motorisations, micro-hybride et 100 % électrique. L'objectif est même d'ouvrir 25 points de ventes en France dédiée.
Lancia veut se relancer en épousant son époque : qualité, électrification et durabilité sont les maitres-mots de ce retour. La Lancia Ypsilon vient tout juste d'être présentée au Salon Automobile de Lyon 2025. Elle semble avoir toutes les qualités et en même temps, il paraît difficile d'être objectif quand on vient de regarder des vidéos de l'Integrale et de profiter de son chant. Lancia s'éveille dans un monde où la Delta Integrale n'a plus sa place. L'Ypsilon ne sonne pas le réveil de la belle endormie, mais plutôt une renaissance, une renaissance en 2025...